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    Kassandra & Léa
  • 15 nov. 2020

Lulu, il était une fois une princesse


Informations pratiques :

Auteur : Lulu Inthesky

Maison d’édition : Jungle !

Année de publication : 2013


Lulu, il était une fois une princesse est une bande-dessinée humoristique et parodique du conte de fées réalisée par Laetitia Lamblain sous le pseudonyme de Lulu InTheSky et publiée en 2013. On retrouve d'entrée de jeu une référence au conte de fées avec la célèbre formule « Il était une fois » dans le titre. Des références sont également présentes dès la couverture avec les chaussures de verre de Cendrillon, les longs cheveux blonds qui rappellent ceux de Raiponce et la présence du crapaud qui renvoie à plusieurs contes où une princesse doit embrasser un crapaud pour qu'il se transforme en prince. Toutefois, dès la couverture, la couleur est annoncée puisque le crapaud n'a pas vraiment l'attitude d'un prince et son langage laisse à désirer. Ainsi, le ton est donné. Les stéréotypes de la princesse parfaite made in Disney vont en voir de toutes les couleurs ! Si vous êtes fan de Disney vous aimerez certainement cette BD très sympa où les références et les clins d'œil sont nombreux. Je trouve que la BD est très intéressante c’est pourquoi plutôt que vous proposer une simple chronique avec mon avis je vais l’analyser et la décortiquer pour vous dans le but de notamment démontrer que des BD aux allures plutôt simples et “juste sympa”, “feel good” peuvent être très riches en réalité.


Quand le conte de fées rencontre la réalité : analyse de la BD


Lulu, une princesse moderne et surtout réelle


On découvre effectivement dans cette BD les aventures d'une jeune femme moderne et parisienne à la recherche du prince charmant tel qu'on nous le vend dans les contes de fées. Avec un style très girly, l'auteure reprend les stéréotypes du conte de fées. Toutefois, ces stéréotypes sont tournés en ridicule car Lulu n'est pas une princesse parfaite et elle ne vit pas dans un conte de fées, mais dans la réalité ce qui change tout et crée des situations cocasses.


Un style « girly » pour une princesse qui veut voir la vie en rose


Ce qui est nommé le « style girly » s'illustre avec la présence d'héroïnes féminines et clichés dont les centres d'intérêt sont principalement les hommes, la mode, etc... Elles doivent correspondre à une image ancrée dans la société. C'est également un style à la gloire du rose et autres couleurs vives et des paillettes. Associé à la BD, cela a donné ce qui est généralement nommé la « BD girly ». Toutefois, des auteures de BD soit disant « girly » se sont exprimées sur le sujet : « BD "girly" "a une connotation péjorative, ça veut dire kawaii (mignonne en japonais), un peu niaise » selon Nine Antico tandis que Pénélope Bagieu exprime une interrogation sur la nature de ce genre de BD : « La BD girly, qu’est-ce que c’est, sinon un terme ultra-condescendant pour parler de l’autobiographie féminine? ». Si le terme est selon elles négatif, Lulu, il était une fois une princesse, s'illustre clairement dans ce style puisqu'elle cumule chacun des éléments énoncés pour le définir. On peut imaginer que le choix de ce style permet de parfaire la parodie du conte de fées.


Princesse recherche prince


Lulu chante à tue-tête dès les premières planches de la BD qu'elle cherche le prince charmant et le confirme à son lecteur quelques pages plus loin. Probablement bercée par les contes de fées de Disney, elle emménage sur Paris pour trouver son « Prince charming » qui doit évidemment être : « à la fois viril et sensible, beau mais pas trop, jeune et aussi mature, charmant mais pas charmeur... », en somme l'homme parfait qui n'existe pas, tout comme Lulu n'est pas parfaite. Son prince, Lulu espère le croiser lorsqu'elle se promène au parc Monceau qui représente un cadre romantique et idyllique pour cela selon les clichés, mais elle déchante vite et passe d'un regard rêveur, idéaliste et naïf à un point de vue plus pessimiste mais plus réaliste. La désillusion paraît totale du point de vue du lecteur lorsqu'elle rencontre non pas un prince mais un crapaud qui parle. Cela peut faire penser aux contes de fées avec la malédiction que seul le baiser d'une princesse peut rompre, mais Alberto n'a rien d'un prince et ce qui apparaît comme une scène de coup de foudre avec le cœur rose autour d'eux et les oiseaux semblables à ceux que l'on retrouve chez Disney, se révèle être une scène ridicule. En tant que princesse moderne Lulu est condamnée à chercher son prince sur un site de rencontre ce qui rappelle la vraie vie. Tout comme dans la vraie vie, Lulu va vite déchanter en se confrontant aux problèmes rencontrés par les femmes qui les utilisent. Le premier message qu'elle reçoit vient d'un homme un peu cavalier et peu sérieux multipliant les sous-entendus sexuels en reprenant des titres de Disneys en les détournant ainsi que de photos très explicites. Le premier homme qu'elle rencontre, surnommé avec justesse « Le Plou(c)tocrate » est un goujat. Le deuxième, ressemblant à Quasimodo avec un T-shirt Stitch, ne correspond pas du tout à sa photo de profil en plus d'employer des techniques de drague pas très fines. Les suivants ne seront pas mieux. Princesse ou pas, Lulu est logée à la même enseigne que toutes les femmes.


Une princesse gracieuse et délicate en toutes circonstances... ou pas !


La princesse idéale est une belle femme féminine, élégante... Si Lulu tente de coller à ce cliché en s'habillant et se coiffant bien et en cherchant à parler de manière distinguée en toute circonstance, elle perd parfois la face. En effet, son sang ne fait parfois qu'un tour lors d'échanges avec certaines personnes, ses voisins au début de la BD et des jeunes hommes l'accostant dans la rue quelques pages plus loin par exemple, et elle en perd ses bonnes manières. Lulu se met alors à déverser toute une flopée d'insultes imagées et originales qui n'ont rien à faire dans la bouche d'une princesse. D'un point de vue graphique, ces déferlements de colère sont dessinés en noir et blanc, exception faite du visage où l'on retrouve des couleurs chaudes pour montrer sa colère, avec un tracé plus grossier la montrant défigurée, disproportionnée.... Elle ne paraît pas non plus très distinguée lorsqu'elle s'entraîne à embrasser avec une cuillère ou qu'on la voit se goinfrer avec différentes sortes de nourritures peu raffinées avec des manières qui ne le sont pas plus.


Princesse de conte de fées ou fée du logis


Cuisinière, ménagère et mère émérite, la princesse parfaite s'illustre comme une femme multitâche. Toutefois, Lulu n'est pas encore au point pour en être une. Tout d'abord, la cuisine. Catastrophe des fourneaux, avec elle c'est le cauchemar en cuisine assuré puisque si elle « cuisine avec Amour », le résultat n'est pas concluant et elle rate même des pâtes. Pour le ménage, Lulu annonce, à la leçon 6 de son guide du « savoir-vivre de la princesse parisienne » , vouloir « Être aussi bonne ménagère que Cendrillon ». De ce côté-là, il y a encore des progrès à faire car la bataille avec l'aspirateur, sa chevelure en train de se faire aspirer par la bête qu'elle monte, empoigne et mord, n'est normalement pas au programme. Finalement, la formule finale de tout bon conte de fées est en péril car Lulu n'aura cesse de déclarer qu'« [elle] hai[t] les mômes » voire qu'« [elle est] allergique aux gosses » menant ainsi dès le leçon 1 de son guide à une révision de la formule : « Vivre heureuse et avoir beaucoup d'enfants ». Ainsi, pour la princesse parfaite il faudra passer son chemin.



Les contes de fées de Disney tournés en dérision par de nombreuses références


On retrouve effectivement énormément de références aux films Disney qui ne servent qu'à se moquer un peu plus de ces derniers.


Chez Disney on pousse la chansonnette


Comme ses idoles, la princesse Lulu multiplie les chansons et pas n'importe lesquelles : les chansons issues de l'univers Disney. Allant de Blanche-Neige (« Un jour mon prince viendra ») à La Petite Sirène (« Là-bas ») en passant par La Belle au Bois Dormant (« J'en ai rêvé ») ou bien encore Cendrillon (« Chante Doux Rossignol », « Tendre rêve »). Les chansons sont nombreuses et facilement reconnaissables. On retrouve une ambiance similaire à celle que l'on retrouve dans les Disneys avec notamment au début de l’œuvre des nuages et un ciel dans des tons roses ce que l'on peut associer au rêve notamment. Les chansons sont une marque de fabrique des films du célèbre studio d'animation américain et Lulu semble avoir intégré cela puisque la leçon 3 s'intitule « Chanter l'amour ». Cependant, cette fois aussi, la rencontre avec le réel et une princesse imparfaite change la donne. Lulu chante terriblement faux comme le montre la typographie qui fait des vagues, les mots qui se tordent, etc... ainsi que l'appendice de la bulle qui semble vibrer. Cela peut aussi être montré par un changement de police moins élégante et plus épaisse pour montrer que Lulu crie et que cela n'a plus rien de mélodieux comme le laisse aussi entendre son visage rouge et sa bouche grande ouverte. De plus, la dimension réelle de l’œuvre crée des ruptures avec ces moments où Lulu semble se perdre dans une certaine fiction. Dans le premier cas, ce sont les voisins qui viennent frapper à la porte énervés car elle les réveille à force de chanter à tue-tête en pleine nuit. La rupture est aussi graphique puisque l'on passe du jour avec des tons roses et oranges à la nuit dans des tons plutôt violet et bleu foncé. Dans le second, la rupture s'opère lorsque l'on réalise que contrairement à ce que l'on pensait, Lulu n'est pas dans la nature mais dans une boutique dont la vendeuse interrompt la jeune femme pour lui demander de quitter les lieux car elle chantait pour un oiseau empaillé. Le décalage rend le tout comique car il y a une exagération des stéréotypes qui les rend complètement risibles.


Une impression de déjà vue/entendue...


Les chansons ne sont pas les seules à être reprises par l'auteure, on retrouve des répliques voire des images marquantes des films. Pour les répliques on en retrouve une tirée de La Belle et la Bête dite à l'origine par Belle et qui est prononcé dans la BD par Alie : « Madame Gaston ? Non mais quelle idée ! ». Dans les deux cas on se révolte à l'évocation stupide d'un couple entre l'héroïne et Gaston, la brute avec peu de cervelle. La seconde réplique que l'on peut noter est dite par Lulu dans la même scénette et est empruntée à Jasmine qui s'indigne alors que l'on cherche à la marier sans lui demander son avis : « Je n'suis pas le premier prix d'une tombola ! ». Un autre élément permet de faire le lien avec Jasmine et il est graphique. En effet, Lulu porte une robe de la même couleur que les vêtements de Jasmine. Enfin, en ce qui concerne l'aspect visuel on va également retrouver une référence claire à La Petite Sirène qui renvoie au moment après le sauvetage du prince Eric où elle finit sa chanson sur le rocher, de par la posture qu'elle adopte, les grands yeux bleus brillants et la vague qui rencontre le rocher.


L'appel de la nature


La nature, et plus particulièrement les animaux, sont particulièrement liés aux princesses Disney. En effet, ces dernières sont souvent entourées d'animaux, surtout les princesses anciennes générations, notamment quand elles se mettent à chanter comme c'est le cas chez Blanche-Neige par exemple. Dans la BD on semble retrouver les oiseaux bleus de Blanche-Neige. On semble donc vouloir recréer ce lien. Toutefois, la parodie apparaît en partie grâce à des décalages comme lorsque Lulu chante au début de l’œuvre entourée de lapins et autres animaux vivant dans la forêt alors qu'elle habite au dernier étage d'un immeuble parisien. On peut aussi parler d'Alberto, le crapaud. Ce personnage grossier à l'humour vulgaire n'est envisagé comme un potentiel prince pour Lulu que lorsqu'elle le rencontre dans le parc. Par la suite, il s'illustre plutôt comme un acolyte. Les princesses sont souvent accompagnées par des animaux qui sont leurs amis : les souris pour Cendrillon, un caméléon pour Raiponce, un poisson pour Ariel... Alberto semble donc prendre ce rôle auprès de Lulu puisqu'il vit avec elle et intervient souvent pour créer un décalage.


Quand fiction et réalité fusionnent

La BD fait beaucoup de références à des personnages Disney que cela se fasse uniquement par l'évocation de noms comme c'est le cas pour Monsieur Gepetto et son fils qui renvoient à Pinocchio ainsi que le musicien Thomas O'maley qui évoque le chat des rues des Aristochats, ou bien en reprenant le physique de certaines personnages. C'est le cas des amies de la concierge de Lulu qui ressemblent respectivement à Aladdin, Jafar et le Sultan mais en femmes. La transposition aura tendance à amuser et surprendre le lecteur. La ressemblance est poussée encore plus loin car la première s'appelle Alie d'Ababoua et vit rue d'Ababoua ce qui fait penser à Aladdin qui se fait passer pour le prince Ali Ababoua. La deuxième se nomme Jafah, ce qui est quasiment identique à Jafar et elle vit rue du Vizir ce qui rappelle le poste occupé par ce dernier. Enfin, la dernière porte le nom de Sultanne ce qui renvoie au Sultan du film, dont on ignore le nom, et vit boulevard d'Agrabah qui est la ville où se déroule tout le film. Bien que très explicite, il ne s'agit que de références et de clins d’œil aux œuvres Disney, mais les personnages apparaissent vraiment aussi. On voit en effet apparaître Aladdin que Lulu tente de draguer jusqu'à ce que sa mère, Alie, intervienne pour lui rappeler qu'il est fiancé à Jasmine, la voisine. Plus loin, elle rencontre le prince Eric qui a bien envie d'aller danser avec Lulu, mais Ariel n'est pas loin et ne l'entend pas de cette oreille. Enfin, Tiana a rencontré Alberto qui semble refuser les avances de la princesse. Ainsi, les personnages de fictions envahissent la réalité de Lulu et la frontière entre la fiction des contes et la réalité est brisée.



L’analyse est terminée ! J’espère que cela vous aura intéressé ! N’hésitez pas à me dire si cela a été le cas ou non (je ne me vexerai pas rassurez-vous !) et dans ce dernier cas ce serait sympa de m’expliquer pourquoi afin de pouvoir faire mieux à l’avenir.


Quel est votre Disney préféré ? Et quel/quelle prince/princesse aimeriez vous rencontrer dans la vraie vie ?


Mon avis en un GIF (disney of course !) :


  • Photo du rédacteur: Kassandra & Léa
    Kassandra & Léa
  • 31 oct. 2020



Informations pratiques

Auteur : Georgia Caldera

Année d’édition : Première édition en 2011 / Mon édition date de 2019

Maison d’édition : Editions du chat noir / France Loisirs

Prix : 8.90€/tome aux éditions J’ai Lu (L’intégrale n’est plus disponible)



Résumé


Cornélia est une jeune femme de 19 ans dont la vie n’est pas toute rose. Sa mère est décédée lorsqu’elle était jeune, son père est très distant et il la pousse dans une voie qui ne lui plaît pas, elle est très seule et un peu marginale… Le coup de trop ? Le décès de sa meilleure amie. Cornélia voit la vie en noir et lorsqu’une petite voix dans sa tête lui souffle qu’elle devrait en finir, que ce serait plus simple… Elle se laisse tenter et tente de mettre fin à ses jours. Mais si l’histoire s’arrêtait là il n’y aurait pas d’histoire, et cet événement tragique n’en est en réalité que le début. Son père décide de l’emmener dans la maison de son enfance, à Rougemont, pour lui offrir du repos une fois sortie de l'hôpital. Tout semble aller mieux : elle se sent plus légère, son père se montre de nouveau attentionné bien qu’un peu trop inquiet, elle n’est plus obligée de poursuivre ses études de droit… Mais des événements étranges et terrifiants se produisent et la sérénité qui commençait à être la sienne est brisée ! Fragile, elle a l’impression de perdre pied. Entre ses cauchemars et la réalité, où se situe la frontière ?

Perdue et angoissée au possible, elle découvre que son nouveau voisin n’est autre que celui qui l’a sauvée et sans qui elle ne serait plus de ce monde. Bizarrement, cet homme étrange, qui l’attire presque autant qu’il l’effraie, semble en savoir beaucoup sur elle et surtout ce qui lui arrive alors qu’elle-même n’y comprend rien. Qui est cet homme ? Pourquoi tant de mauvaises rumeurs courent-elles sur lui au village ? Que se passe-t-il ? Qui lui veut du mal ? Comment faire pour que tout s’arrête ? Que signifient ces rêves si réalistes ?



Avis

- chronique solo de par Kassandra -


J’ai lu cette intégrale d’un coup mais j’ai mis un assez long moment à le lire pour tout vous dire. Non pas parce que l’histoire n’était pas bonne, mais parce que j’avais l’impression de ne pas avancer. Presque 1800 pages vous les sentez passer ! Comme j’ai enchaîné les tomes j’ai l’impression d’avoir lu qu’un seul et même gros livre c’est pourquoi je vais traiter de la trilogie d’un seul coup. Toutefois, j'indiquerai quand mes remarques concernent le tome 1, le tome 2 ou le tome 3 lorsque ce sera possible afin d’éviter de vous spoiler !


Tome 1 : Réminiscences


Tout d’abord, le style d’écriture de l’auteure est agréable durant toute la trilogie. J’ai vraiment bien aimé la plume de Georgia Caldera qui avait à la fois un style un peu ancien et en même temps totalement fluide. Il n’y a pas vraiment de grosses longueurs et j’ai été surprise de ne pas m’ennuyer ferme lors des descriptions qui étaient relativement conséquentes. L’équilibre entre description et dialogues reste totalement correct.

En ce qui concerne le genre du roman, on part sur du fantastique, mais du fantastique comme l’a défini Todorov : une intrusion du surnaturel dans un cadre réaliste. L’auteure nous fait douter de ce qui est réel et de ce qui ne l’est pas. On se demande si les choses arrivent réellement ou si l’héroïne dont on suit le point de vue a tout imaginé. C’est intéressant parce qu’on est aussi perdu que Cornélia, pleins de doute et d’incompréhension.

D’ailleurs, le doute n’est pas le seul sentiment que l’auteure parvient à nous faire ressentir : elle sait particulièrement bien créer un sentiment d’angoisse assez étouffant. La scène de la salle de bain vers le début du premier tome, par exemple, m’a marqué. Je ne suis habituellement pas fan de tout ce qui est horreur et gore, pas du tout même mais j’ai quand même bien aimé l’atmosphère gothique et horrifique du roman dans son ensemble. Je le recommande particulièrement aux amoureux de l’hémoglobine qui seront au paradis car croyez-moi sur paroles, le sang coule à flot dans cette trilogie !

Enfin, ce que j’ai également trouvé très intéressant c’est le choix de G. Caldera quant aux caractéristiques de ses vampires. Le vampire, comme je vous l’ai expliqué et démontré dans l’article “Les monstres d’hier sont les héros d’aujourd’hui : focus sur la figure mythique du vampire” publié sur notre blog, a beaucoup évolué. L’auteure a choisi de retourner un peu aux sources du mythe et nous présente un vampire possédant des caractéristiques modernes (physique avantageux par exemple) mais bien moins glamour par certains aspects (je n’en dirai pas plus, il serait fort dommage de vous gâcher la surprise). D’ailleurs, le fait que les vampires se situent dans cet entre-deux va ramener des questions de moralité tout au long de la trilogie.


En ce qui concerne les personnages je suis un peu plus mitigée… J’ai eu du mal avec l’héroïne. Elle manque parfois de jugeote car dans certaines situations les indices dont elle dispose pourraient lui permettre de tirer des conclusions, de deviner. Mais ce n’est pas le plus dérangeant. Sa capacité à accepter et à s’habituer à toutes les horreurs dont elle est témoin a rendu l’identification difficile en ce qui me concerne. Elle m’a également pas mal énervée lorsqu’elle gardait sous silence des choses importantes et repoussaient des révélations inévitables ce qui avait évidemment pour conséquence d’empirer la situation.

Il y a clairement un manque de communication énorme entre Henri et elle. Leur couple ne m’a pas fait rêver. Cornélia m’agaçait parce qu’elle ne semblait pas savoir ce qu’elle voulait. Tantôt elle assurait être prête à tout accepter tant elle aime Henri, tantôt elle affirme que c’est trop horrible et elle doute, lui fait des reproches. Elle ne cesse de faire le yoyo ce qui est pénible à la longue, surtout que Henri et son entourage l’ont prévenu dès le départ. Il y a aussi le fait qu’elle crie et se dispute avec Henri en lui reprochant toutes sortes de choses alors qu’elle n’est pas capable de lui parler sincèrement et calmement des problèmes qu’il y a dans leur relation. Le manque de communication est de plus en plus flagrant. Et il va dans les deux sens ! Par exemple, Henri insiste sur le fait que Cornélia ne doit pas utiliser son pouvoir sans lui expliquer pourquoi et Cornélia ne demande pas d’explications. Si Henri lui disait les choses elle pourrait comprendre et être plus raisonnable. C’est dommage et énervant.



Tome 2 : Rémanences


En plus de ce qui a déjà été dit, je dirais que les songes sont un peu longs selon moi. Il s’agit dans la majeure partie de mauvais souvenirs et de moments avec de longues descriptions de trucs horribles, sanglants et gores… Les tortures corporelles deviennent particulièrement redondantes dans ce second tome. Je suppose que le fait que je n’aime pas vraiment ce genre de scènes joue dans mon ressenti.


Dans le second tome Cornélia est une vraie girouette ! Elle prétend haïr Henri mais couche avec lui l’instant d’après avant de le rejeter puis de partir à sa recherche en se mettant en danger car elle dit l’aimer et ne pas pouvoir vivre sans lui. J’ai du mal avec ce genre de personnage.


Finalement, je dirais que le cliffhanger du tome 2 est bien trouvé, évidemment, mais il était assez prévisible.


Tome 3 : Déliquescence


Je pense que c’est le tome que j’ai préféré !


Tout d’abord, là où les rêves/souvenirs étaient un peu longs et m’intéressaient moyennement dans les deux premiers tomes, j’ai trouvé les souvenirs volés de ce tome moins dérangeants. Le fait de rendre le personnage plus humain aux yeux du lecteur à la fin me semble particulièrement intéressant. C’était intéressant, bien joué !


En ce qui concerne Cornélia et Henri leur relation m’a beaucoup plus convaincu dans ce troisième tome ! Même si j’ai trouvé que Cornélia s’habitue un peu vite aux conséquences de sa nouvelle vie vis-à-vis du regard très moralisateur qu’elle a porté jusque-là, j’ai apprécié qu’elle soit moins pleurnicharde. De plus, tout comme Henri, elle semble gagner en maturité et ils apprennent enfin de leurs erreurs passées. J’ai bien aimé le fait qu’il n’y ait pas réellement de triangle amoureux, que Cornélia sache avec certitude ce qu’elle veut, cela a permis d’éviter le vu et revu. Je regrette seulement la scène de la mairie que j’ai trouvé cruelle et qui aurait probablement pu être évitée selon moi.


Finalement : la fin ! Elle est clairement douce-amère !

D’un côté le grand méchant est enfin vaincu mais de l’autre beaucoup de personnages sont morts (mon pauvre Séraphin… snif snif….). En plus, l’auteure est un peu sadique car elle a tué ceux que l’on a pu apprendre à connaître et à qui on s’est un minimum attaché…

J’ai été surprise par le fait qu’ils aient des jumelles et qu’elles portent ces noms-là, agréablement surprise. J’ai beaucoup aimé ce bel hommage. J’ai été heureuse que l’on ait une fin heureuse pour Maxime qui le méritait clairement.

Néanmoins, si la fin est plutôt bonne, elle laisse des questions en suspens ce qui m’a un peu frustrée. Tout d’abord, après tout ce qu’il s’est passé, le retour à Rougemont n’a-t-il pas posé de problèmes ? Ensuite, on en apprend finalement peu sur la nouvelle génération de vampires, c’est dommage, on aimerait en savoir plus !


Dans l’ensemble, ce n’est pas une lecture que j’ai l’habitude de lire, j’ai eu un peu de mal à avancer et ma relation avec l’héroïne a été compliquée mais j’ai plutôt bien aimé cette lecture qui change un peu de ce que l’on peut trouver dans ce genre.


Mon ressenti en un GIF :


  • Photo du rédacteur: Kassandra & Léa
    Kassandra & Léa
  • 28 oct. 2020


Informations pratiques :

Auteur : Diana Wynne Jones

Année d’édition : Première édition anglaise en 1986, 2002 pour la France. Mon édition est de 2020.

Maison d’édition : Mon édition (et la seule trouvable à un prix tout à fait correct) vient de chez Ynnis Edition.

Prix : 14.95€ (broché), 9.99€ (ebook)

 

Réalisateur, Producteur, Scénariste : Hayao Miyazaki

Studio d'animation : Studio Ghibli

Année de sortie : 2004

Durée : 119 minutes (= 1h et 59min)


- Chronique comparatiste solo de Kassandra -


Le château de Hurle est un roman de fantasy écrit par Diana Wynne Jones et publié en 1986. Sa publication commence à dater c’est pourquoi vous n’en avez peut-être encore jamais entendu parler. Toutefois, le titre “Le Château ambulant” vous est potentiellement plus familier. Il s’agit d’une adaptation en film d’animation, plutôt libre, réalisée par Hayao Miyazaki. Son nom ne vous est sûrement pas inconnu et ce n’est pas pour rien : il est l’un des fondateurs du célèbre studio de films d’animation Ghibli (si il y a des fans parmi vous n’hésitez pas à venir nous dire quel est votre film préféré du studio).

Donc, vous ignorez peut-être que ce roman a récemment eu le droit à une réédition, qui est au passage très belle, c’est pourquoi c’est l'occasion parfaite de le lire (jusque-là il était très difficile à trouver, surtout à un prix correct). Dans cette chronique je vais vous dire ce que j’ai aimé dans cette histoire, évidemment, mais aussi vous exposer les diverses différences entre l'œuvre littéraire et l'œuvre cinématographique qui justifie donc la nécessité de lire le roman mais aussi de voir le film. Si vous avez vu le film mais pas lu le livre et que vous avez aimé, je vais tenter de vous convaincre d’y remédier parce que vous ratez quelque chose.

Personnellement, j’ai découvert le film il y a déjà plusieurs années et j’ai vraiment adoré. J’ai arrêté de compter le nombre de fois que je l’ai visionné et je peux vous dire que je pourrai le regarder encore et encore ! En découvrant qu’un roman a inspiré Hayao Miyazaki (dont je suis fan !) j’ai voulu le lire pour voir quelle était la matière première qui a donné ce film. Je suis ravie de l’avoir fait.

Avec le roman on découvre tout un pan de l’histoire qui n’existe pas dans le film, certaines choses sont beaucoup plus approfondies et la fin est totalement différente. Mais, d’un autre côté, le film apporte totalement autre chose, quelque chose qui est clairement la patte du réalisateur japonais et que j’ai quand même apprécié. Certes, le film est une adaptation libre qui n’est pas totalement fidèle à l’histoire de base, mais il apporte des éléments nouveaux tout en gardant le fil principal de l’intrigue et les personnages principaux, ce qui peut être tout aussi intéressant je pense. En ce 28 octobre, journée mondiale du film d’animation, il me tient à cœur de vous présenter ces deux œuvres génialissimes qui méritent à être connues.


Tout d’abord, voici un résumé de l’histoire commun aux deux œuvres pour ceux qui ne connaissent pas.


Résumé

Sophie est une jeune fille vivant dans le pays merveilleux d’Ingary. Elle est l’aînée de deux sœurs, Lettie et Martha et la fille d’un chapelier. Au décès de ce dernier, elle accepte le destin peu trépidant qui est écrit pour elle et reprend la boutique familiale. Toutefois, elle reçoit une visite inattendue qui lui réservera une bien mauvaise surprise : la sorcière que tout le monde craint lui lance une malédiction. Là-voilà transformée en vieille femme. Sophie ne se laisse pas abattre mais quitte sa ville pour ne pas inquiéter ses proches. Elle croise alors, par hasard (si vous y croyez) le château ambulant du terrible magicien Hurle. Enfin... Le plus terrifiant chez lui, c'est sa réputation. On raconte en effet, à qui veut bien l’entendre, qu’il dévore le cœur des jeunes filles. Hurle n’est en réalité qu’un poltron superficiel, égoïste et insensible lié par un contrat mystérieux au puissant (flatter l’égo d’un démon est toujours bon pour soi donc… ) démon du feu Calcifer. Ou peut-être est-ce seulement ce qu’il laisse voir. Dans quelle mesure tout cela est-il vrai ? Sophie va finir par le découvrir au fil de son enquête, car enquête il y a ! A son arrivée Calcifer la supplie de découvrir la nature du contrat qui l’enchaîne à Hurle, et par conséquent à l’âtre de la cheminée du château, en échange de quoi il la libérera du maléfice qui est le sien. Débute alors une relation pimentée entre les personnages, des rencontres étranges, des événements mystérieux, des surprises étonnantes et une course contre la montre avec pour ennemi une sorcière… ou le destin.



Avis



J’ai vraiment aimé ce roman parce que j’ai trouvé l’écriture à la fois riche et agréable ! Il a été écrit il y a plus de trois décennies et pourtant l’écriture n’est pas dérangeante.

On découvre un univers sympathique et complètement original ! On a l’impression de se retrouver dans un conte de fée où le merveilleux est normal puisque la magie est monnaie courante. De plus, des clins d'œil à certains contes sont présents par-ci par-là et il est amusant de les remarquer.

De leur côté, les personnages sont variés mais tous hauts en couleur et singuliers. Il n’existe pas deux Hurle dans la littérature je pense (heureusement, ou pas, je n’arrive pas à me décider....) ! Ils sont pour la plupart attachants ce qui est important.

Les intrigues sont toutes intéressantes et bien menées. J’ai apprécié le fait que la lecture exige un minimum de concentration et de réflexion pour tout bien suivre et pour parvenir à faire des déductions par nous-même tout comme Sophie. On a des rebondissements et des surprises qui viennent rythmer le récit. Il n’y a pas de grosses longueurs et les échanges entre Hurle et Sophie sont géniaux ! Réunis, le caractère de l’un met le feu au poudre du caractère de l’autre et nous, lecteurs, mangeons du pop corn devant ce feu de joie !

C’est vraiment une lecture sympathique, originale et dont le suspens est plutôt bon tout comme les personnages c’est pourquoi je vous la recommande.


Pour ce qui est du film, j'ai eu un coup de cœur pour ce film que je ne sais pas vraiment expliquer. J’aime les graphismes (mais ça ce n’est pas nouveau puisque je suis fan du travail d’Hayao Miyazaki), les personnages, l’histoire avec les changements apportés… Je vous recommande vraiment de tenter surtout qu’un peu moins de 2h ce n’est pas grand chose ! Vous n’avez rien à perdre et tout à gagner !


Livre et film : les différences (liste non-exhaustive)


Je vais tenter d’indiquer les éléments dans l’ordre de l’histoire et signaler par un changement de couleur lorsque certains éléments sont vraiment importants et risquent de vous spoiler sévèrement l’histoire même si je vous conseille fortement de ne lire cette partie de la chronique que si vous avez déjà découvert les deux œuvres (surtout le livre).


Pour commencer, il y a le fait que Sophie a en réalité deux sœurs dont elle est l’aînée : Lettie et Martha. A la mort de leur père, elles doivent arrêter l’école et partent chacune en apprentissage. Lettie est envoyé chez Savarin, le pâtissier de la ville, Martha va chez Madame Bonnafé qui n’est autre qu’une sorcière et Sophie reste à la chapellerie car en tant qu’aînée, c’est elle qui héritera de la boutique. Mais, si Sophie est prête à se soumettre au destin déjà tout écrit pour elle, Lettie et Martha ont dès leur plus jeune âge commencé à exprimer leur désaccord. Lettie refuse de moins réussir que Martha sous prétexte que cette dernière est la dernière née et rêve de faire un beau mariage, tandis que Martha exprime son désir de réussite et d’indépendance. Alors, elles changent leur destin en interchangeant leur apprentissage grâce à un sort leur permettant d’échanger leur apparence. Vous vous doutez bien que cela créera quelques petits soucis... Mais, dans le film tout cela n’a pas lieu car Martha n’existe pas et Lettie effectue sagement son apprentissage à la pâtisserie Savarin où elle a beaucoup de succès. Toutefois, dans les deux œuvres Lettie encourage Sophie à faire ce qu’elle souhaite de sa vie et ne pas se résoudre à reprendre la boutique si cela ne la rend pas heureuse.


Avec la disparition de Martha on a également la disparition de l’histoire d’amour qui se dessine entre elle et Mickaël. D’ailleurs, celui qui devient Marco dans le film n’est pas un petit garçon dans l'œuvre de Diana Wynne Jones mais un adolescent d’une quinzaine d’années. Cela peut paraître être un détail mais cela joue sur la maturité et le caractère de l’apprenti. Néanmoins, cela ne reste pas profondément problématique pour l’intrigue principale puisque l’intrigue secondaire à laquelle il est lié n’a pas été conservée.


Certaines choses ont toutefois été gardées mais seulement de manière partielle ou modifiées. Dans les deux œuvres, Hurle/Hauru est précédé par sa réputation de coureur de jupons. En fait, il est même dit qu’il dévore le cœur des jeunes filles. C’est quelque chose d’intéressant et d’assez important qui n’est pourtant pas expliqué dans l'œuvre de Miyazaki. Dans le roman, on voit beaucoup plus le côté séducteur de Hurle qui lui vaut cette si mauvaise réputation. En effet, il s’absente souvent dans un beau costume, guitare à la main, pour aller charmer des jeunes femmes. Hurle n’est pas méchant, il tombe seulement très facilement et très vite amoureux des jeunes filles. Le fond du problème, c’est que tout comme le célèbre personnage Don Juan que vous connaissez très certainement, son amour n’est nourri que par le challenge. Une fois que l’heureuse élue cède aux charmes du jeune homme, l’histoire de cœur perd toute sa saveur, tout son intérêt et l’amour fane. L’amour de Hurle est à l’image d’une fleur : éphémère. C’est en cela, notamment, que l’absence de cœur se fait ressentir. On imagine bien que le fait que Calcifer soit en possession du cœur de Hurle, en délestant ce dernier, a des conséquences sur sa vie et sa gestion des sentiments. D’ailleurs, on peut noter que Hurle et Hauru ont tous les deux en commun une certaine immaturité qui fait échos au fait qu’ils ont perdu leur cœur étant enfant et sont par certains aspects resté coincés à cet âge. Sophie le sous-entend lorsqu’elle dit que le cœur palpite comme celui d’un enfant dans le film.


Dans le film, on voit Hauru utiliser le repère noir à chaque fois qu’il part au combat, mais comme nous verrons cela plus tard il s’agit d’une modification de taille relative au film. Dans le roman, la destination du repère noir n’est pas un secret, il mène à quelque chose d’intéressant et important : le pays de Galles. Il s’agit du pays d’origine de Hurle où vit encore sa sœur et sa famille. D’ailleurs, la fenêtre présente dans la chambre du magicien permet, grâce à un sortilège, de voir ce qu’il s’y passe. Cette dimension de la vie de Hurle rajoute une couche de profondeur et de complexité au personnage.


D’autres aspects de la vie de Hurle ont été effacés ou ont subi des modifications lors de l’adaptation. Par exemple, dans le roman Sophie rencontre la mentor de Hurle qui lui a tout enseigné et qui est une personne importante pour lui. L’attachement mutuel et réciproque des personnages est intéressant et rend Hurle plus attachant. Sauf que dans le film c’est l’enchanteresse Suliman qui est censée avoir formé Hauru à la magie jusqu’à ce qu’il lui tourne le dos.

D’ailleurs, dans le film c’est cette dernière qui joue le rôle de la grande méchante en tant qu'incarnation de la guerre volant ainsi la vedette à la réelle méchante : la sorcière. Sorcière des Landes dans le film, elle répond au nom de sorcière du Désert dans le livre. Dans l'œuvre cinématographique la sorcière des Landes en veut à Hauru avec qui elle a eu une histoire et qui l’a quitté c’est pourquoi elle lui lance une malédiction et le pourchasse. Elle finira neutralisée assez facilement par l’enchanteresse Suliman et les années l’ayant rattrapée elle ne devient qu’une vieille femme plutôt inoffensive. Dans le roman, rien à voir. La sorcière du Désert est bien plus machiavélique et il n’est pas question de la relayer au second plan. Cette dernière a lancé une malédiction et pourchasse Hurle, mais ses motivations n'ont aucun rapport avec un rejet amoureux. Non. La sorcière du Désert se la joue docteur Frankenstein afin de créer l’homme parfait pour devenir roi et régner à ses côtés. Il ne lui manque plus que la cerise sur le gâteau, ou plutôt la tête sur les épaules et c’est celle de Hurle qu’elle veut.

Hurle, on s’en doute et on le comprend, n’est pas très enthousiaste et fait de son mieux pour lui échapper, mais il sait qu’une fois que la prophétie de la malédiction sera complète, la sorcière le retrouvera. Ce qui dans le film n’est que vaguement exploité à travers un dessin gravé dans le bois (que l’on peut analyser et plus ou moins comprendre à la lumière des quelques phrases énoncées par Hauru) est assez central dans l’intrigue du roman. Il est tout au long de l’histoire question du poème de John Donne (Chanson) dont les deux premières strophes correspondent à la prophétie. De plus, on voit réellement que Hurle a peur et redoute la réalisation de cette malédiction dont on voit les vers prendre sens et se réaliser petit à petit.

D’autres éléments sont plus exploités dans le roman et paraissent donc plutôt mystérieux ou semblent tomber de nul part dans le film. Je pense notamment à l’identité de l’épouvantail, alias Navet. En effet, ce personnage sympathique du film qui s’apparente à un acolyte, un ami pour Sophie, est en réalité un personnage qu’elle fuit pendant les ¾ du roman parce qu’il l’effraie. On découvre finalement, comme dans le film, qu’il s’agit en réalité du prince Justin porté disparu. Toutefois, dans le film il en est très peu fait mention alors qu’il est question de cette disparition tout au long du roman. Le prince a disparu et le magicien Suliman (c’est de là que vient l’enchanteresse même si il n’y a pas de lien évident entre ces deux personnages) est envoyé par le roi pour le retrouver. La sorcière est suspectée de l’avoir enlevé, alors pour la vaincre il plante des fleurs afin de faire reculer le désert où elle règne. Il sera à son tour capturé et porté disparu. Ce sont ces disparitions qui font que Hurle sera sollicité par le roi pour les retrouver, mission à laquelle il tente d’échapper lâchement. Hurle finit par les retrouver mais… en pièces détachées ! Eh oui ! La sorcière s’est amusée à prendre une partie de leur corps pour son souverain idéal et a éparpillé et transformé le reste. C’est ainsi que le prince s’est retrouvé dans le corps de Navet et que le magicien Suliman s’est en partie retrouvé métamorphosé en homme-chien. Je n’en dirai pas plus si ce n’est que je comprends enfin pourquoi il y a un chien dans le film de Miyazaki bien qu’il ne semble pas servir à quoi que ce soit (si quelqu’un a une explication je suis preneuse !).


La famille de Hurle et l’importance de la sorcière sont liées à un autre personnage très important du livre : Mlle Angoriane. Institutrice du neveu de Hurle, elle fait tourner la tête du magicien ce qui rend jalouse et agace Sophie. Mais, sous le visage de la belle et soi-disant innocente et inoffensive Angoriane se cache une réalité inattendue ! Tout comme Hurle la sorcière possède un démon mais il semble que ce dernier se soit libéré et ait besoin d’un nouveau cœur et celui de Hurle semble être à son goût ! Dans le film il n’est pas du tout question d’un second démon c’est pourquoi je n’ai pas vu venir cette révélation finale très intéressante.


Pour parler du dénouement je dois revenir sur un fait que je n’ai pas encore commenté et qui est pourtant essentiel : Sophie a des pouvoirs dans le roman ! En effet, sans être une sorcière très puissante elle semble capable de donner vie aux objets. Ainsi, elle prédira l’avenir des chapeaux qu’elle confectionne, donnera un pouvoir d’attraction puissant à un des costumes de Hurle… On comprend alors pourquoi Calcifer lui révèle qu’elle est la seule à pouvoir briser le contrat qui le lie à Hurle en les sauvant tous les deux. La formule “que tu vives mille ans encore” prononcée par Sophie prend alors tout son sens alors que dans le film elle perd du poids en l’absence d’une explication.


La fin rime aussi avec retrouvailles familiales ! Alors que dans le film la belle-mère de Sophie la trahit et que Lettie n’est plus évoquée, on se retrouve avec une Happy End réunissant une bonne partie des personnages dans le roman. Au passage, on peut mentionner que la formule au début du roman, qui, si elle diffère du “Il était une fois” traditionnel, ressemble beaucoup au début d’un conte de fée avec un univers merveilleux, se termine sur une happy end dans la même ambiance.


Je terminerai cette partie en parlant de la relation entre Sophie et Hurle qui est différente dans les deux œuvres. En effet, dans le roman elle est à la fois plus piquante et plus réaliste car on la voit naître du côté de Sophie tandis que du côté de Hurle on apprend seulement par la suite que derrière certaines de ses actions et certains événement il y avait de la bienveillance. Hurle se montre attentionnée puisqu’il sait depuis le départ que Sophie est victime d’un sortilège et cherche à se renseigner, l’aider et lui faire plaisir tout au long du roman même si nous n’en avons pas conscience car ses actions sont soit mal interprétées, soit dissimulées par un autre objectif. Les révélations à la fin du roman le rendent alors encore plus attachant et la Happy end amusante nous réjouit et tombe sous le sens alors que dans le film on ne sait pas vraiment quand et surtout à quoi est dû le changement dans leur relation.



Je sais, face à cette liste vous avez l’impression qu’il manque énormément de choses et si vous n’avez pas encore vu le film vous doutez peut-être (à tort !) de la qualité de ce dernier.

Il est certain que si ce que vous attendez d’une adaptation c’est une fidélité totale alors vous serez peut-être déçu. Toutefois, une telle attente réduit à néant la possibilité du réalisateur de créer quelque chose, ce qu’a indéniablement fait Hayao Miyazaki. Le réalisateur japonais s'est en fait inspiré de l'œuvre originale et en a tout de même conservé une bonne partie, mais il y a aussi ajouté sa touche personnelle en plus d’une nouvelle couche d’interprétation.


Un des plus gros changements c’est la place de la guerre dans l’histoire. Si vous connaissez un peu les œuvres de Miyazaki vous savez qu’il défend à travers eux plusieurs luttes telles que le féminisme, l’écologie ou bien encore le pacifisme. La guerre est un thème récurrent dans ses œuvres et ici il en est presque au cœur. En effet, ce qui n’est qu’un détail, un élément rapidement évoqué, devient très important puisque Hauru s’absente souvent pour combattre cette guerre insensée qui déchire le pays d’Ingary. On voit cela à travers l’opposition d’Hauru face à l'enchanteresse Suliman qui, comme je l’ai expliqué plus haut, représente physiquement la guerre que le jeune magicien combat également physiquement en tentant d’arrêter les bombardements. Miyazaki montre l’absurdité de cette guerre, et au fond de toutes les guerres, avec le fait que l’on ne sait pas qui combat qui et surtout pourquoi. On notera aussi que Hauru ne prend partie pour personne et cherche seulement à sauver les civils qui ne comprennent pas et sont innocents dans l’histoire. Ainsi, c’est une fois encore avec intelligence que le maître de l’animation japonaise transmet son message.


Le second point sur lequel nous allons nous arrêter c’est l’intégration d’un voyage dans le temps qui permet alors à Sophie de découvrir les tenants et aboutissants du contrat qui unit Hurle et Calcifer et explique le fait qu’elle soit celle qui doit les libérer. En supprimant les pouvoirs de Sophie et toute l’intrigue autour du poème, il a bien fallu trouver une solution et celle-ci qui fut trouvée. Ainsi, alors que dans le roman Sophie fait elle-même le cheminement nécessaire pour comprendre, elle est aidée dans le film par ce voyage dans le temps initié par la bague confiée par Hauru sans que l’on comprenne tout.



Une adaptation libre permet de redécouvrir un univers qui nous a plu à travers un autre regard que celui de son créateur et cela peut-être très intéressant. En plus, vous évitez l’impression de déjà vu ! Alors, si Miyazaki a fait le choix de supprimer ou modifier certains éléments il en a aussi ajouté afin de créer cette adaptation poétique.



Si vous avez lu/vu le livre/le film, n’hésitez pas à venir me dire ce que vous en avez pensé ! Si vous êtes des connaisseurs ou des fans du studio Ghibli n’hésitez pas à me dire quel est votre film préféré (Miyazaki ou non ! J’aime beaucoup Takahata aussi par exemple).



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